AJDA 2007 p. 1680

 

La procédure de contestation des taxes et participations d'urbanisme

 

 

Stéphane Glogowski, Chargé d'enseignement à l'université de Rouen

 

 

 

 

L'essentiel

La procédure de contestation des taxes et participations d'urbanisme est traditionnellement liée à leur nature juridique. La jurisprudence laisse toutefois émerger une catégorie résiduelle de participations à caractère hybride : si les réclamations relatives à leur bien-fondé sont instruites et jugées selon les règles de la procédure fiscale, leur recouvrement obéit aux règles de droit commun des créances publiques non fiscales.

 

 

 

Alexis de Tocqueville pouvait bien s'exclamer que « c'est [...] dans la commune que réside la force des peuples libres » (De la démocratie en Amérique, 1835), les taxes et participations d'urbanisme que ces derniers supportent à l'occasion d'opérations immobilières doivent donner à la liberté un certain goût d'amertume... Depuis les lois de décentralisation de 1982 et 1983, les communes sont amenées à intervenir dans des domaines qui nécessitent d'investir dans des équipements publics toujours plus coûteux (voies de communication, réseaux d'équipements, collecte et élimination des ordures ménagères, transport public...). Or les moyens financiers octroyés ne compensent que partiellement les nouvelles compétences que le législateur national délègue aux collectivités locales (G. Dechelette, Les collectivités locales face à leurs besoins en équipements publics, AJDI 1998. 507 ). Afin de faire face à ces besoins d'équipements publics, la commune peut faire appel à des financements traditionnels (impôts directs locaux, dotation globale d'équipement, subventions, etc.). Mais le financement le plus efficace consiste, pour la commune, à faire supporter au bénéficiaire d'une autorisation de réalisation d'un projet immobilier le coût des dépenses d'équipements publics que son autorisation d'occuper le sol a mis à sa charge.

 

L'article 332-6 du code de l'urbanisme énonce, à propos de ces taxes et participations d'urbanisme, qu'à l'exception de la taxe locale d'équipement (TLE) ou des participations dont le paiement résulte d'un programme d'aménagement d'ensemble (art. L. 332-9 C. urb.), le constructeur ou le lotisseur (art. L. 332-12 C. urb.) ne peut se voir demander que le versement des contributions aux dépenses d'équipements publics mentionnées à l'article L. 332-6-1. L'article L. 332-6 ajoute à cette liste limitative le versement de la redevance d'archéologie préventive, ainsi que la réalisation des équipements propres de la construction ou du lotissement (art. L. 332-15 C. urb.) : voirie, alimentation en eau, gaz et électricité, réseaux de télécommunication, évacuation et traitement des eaux et matières usées, éclairage, aires de stationnement, espaces collectifs, aires de jeux et espaces plantés. Le bénéficiaire d'une autorisation de construire peut également être tenu, en dehors de l'article L. 332-6, au paiement d'une redevance pour la création de bureaux en Ile-de-France (art. L. 520-1 C. urb.), ainsi que d'un versement pour dépassement du plafond légal de densité (PLD) (art. L. 112-2 C. urb.). Le régime des taxes et participations posé par l'article 332-6 du code de l'urbanisme repose donc sur une double prohibition : prohibition du cumul de la TLE avec les participations alternatives résultant d'un programme d'aménagement d'ensemble (PAE) (art. L. 332-9 C. urb.) ou d'une zone d'aménagement concerté (ZAC) (art. L. 311-4 C. urb.) ; prohibition des taxes ou participations additionnelles ne relevant pas de la liste exhaustive énoncée plus haut.

 

Les débiteurs de ces créances d'urbanisme ne sont toutefois pas dénués de tout recours en contestation, que ce soit lors de la délivrance du permis, de la notification du titre de recette, des poursuites engagées par les services du recouvrement, ou d'un événement, postérieur au versement, justifiant la restitution des sommes indûment versées. Mais la voie qui mène à la reconnaissance du bien-fondé de cette contestation est semée d'embûches : réclamation préalable (dans certaines hypothèses seulement), destinataire de la réclamation (qui n'est pas toujours l'autorité signataire de la décision contestée), délai de prescription accompagnant chaque étape de la procédure, etc. Si les services liquidateurs ont pu bénéficier, en leur temps, de plusieurs lois de validation couvrant a posteriori les nombreuses irrégularités de procédure entachant leurs décisions (v. J.-P. Maublanc, La fiscalité de l'urbanisme entre clarification jurisprudentielle et turbulences législatives, AJDI 2000. 26 ), il n'en va pas de même du simple citoyen-promoteur qui cherche à contester une créance qui a été mise à sa charge. La réforme du permis de construire et des autorisations d'urbanisme, dont l'entrée en vigueur est prévue au 1er octobre 2007, comporte d'ailleurs des incidences significatives sur la procédure de contestation (Ord. n° 2005-1527 du 8 déc. 2005 ; décr. n° 2007-18 du 5 janv. 2007 ; Y. Jégouzo, Les opérations soumises à une autorisation prévue par une législation étrangère à l'urbanisme, AJDA 2007. 249 ). L'admission du permis tacite au rang de règle générale autorise l'administration à prendre l'arrêté fixant les taxes et participations exigibles dans le délai de deux mois suivant l'intervention de ce permis tacite (art. L. 424-2 C. urb.). Quant à l'application des taxes et participations d'urbanisme au permis de construire, au permis d'aménager et à la déclaration (art. L. 332-12 et L. 332-28-1 C. urb.), elle conduit à imposer d'anciens régimes d'autorisation, désormais regroupés dans la dénomination de permis d'aménager, pour lesquels cette fiscalité n'était pas systématiquement exigible.

 

L'action en répétition de l'indu constitue, à ce titre, une voie procédurale de contestation commune à l'ensemble des participations et taxes d'urbanisme. Régie par l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme, elle répute sans cause les taxes et contributions de toute nature qui sont imposées en violation des dispositions des articles L. 311-4 et L. 332-6 du même code (pour des illustrations : TA Lyon 11 oct. 2006, M. Garnavault, n° 0405430 ; CAA Bordeaux 11 mai 2006, M. Ramos c/ Commune de Lauzerville, req. n° 03BX00570 et 03BX00808 ; TA Lyon 29 juin 2004, Société 4M Promotion, n° 0105698).

 

L'action en répétition de l'indu, qualifiée par la Cour de cassation de « principe commun au droit public et privé internes, ainsi qu'au droit communautaire » (Com. 17 janv. 1989, Decelle, n° 87-13.579, RJF 1989, n° 3, p. 386), ne peut être assimilée à une action en responsabilité. En effet, l'action doit être dirigée contre le bénéficiaire de la participation, y compris s'il n'est pas l'auteur de la décision - et donc l'auteur de la faute - (CE 20 janv. 1984, SCI Clinique Saint-Martin). Cette action relève, en principe, de la compétence du juge administratif statuant en pleine juridiction. Elle peut toutefois relever de la compétence du juge judiciaire de façon exceptionnelle, lorsque la participation indûment versée par le constructeur ou le lotisseur prend la forme : soit d'une cession gratuite de terrain dépassant en surface la limite légale de 10 % fixée à l'article 332-6-1 e) du code de l'urbanisme (v. TA Marseille 12 mars 2001, Mme Uldaric, n° 0003697 ; P. Galan, Les cessions gratuites de terrains de l'article R. 332-15 du code de l'urbanisme - une contribution financière aux incidences patrimoniales publiques et privées multiples, RD imm. 1998. 49 ), soit d'une redevance calculée en fonction de l'importance du service rendu, et habituellement réclamée aux usagers des services publics à caractère industriel et commercial (CE avis 10 avr. 1992, SARL Hofmiller, Lebon 159  ; AJDA 1992. 687, obs. X. Prétot  ; RFDA 1994. 159, concl. J. Arrighi de Casanova , à propos de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères ; TA Paris 19 déc. 1972, SARL Sogrimo c/ EDF, CJEG 1973. 64).

 

Considérée comme soulevant un litige en matière de travaux publics (CE 12 févr. 1988, Ministre de l'Urbanisme et du Logement c/ Société des automobiles Citroën, Lebon 64 ), l'action en répétition ne peut se voir opposer le délai de droit commun de deux mois pour saisir le juge administratif (art. R. 421-1 CJA). Elle est également dispensée du ministère d'avocat en première instance, ainsi que de la présentation d'une réclamation préalable auprès de l'administration. Par ailleurs, le 3e alinéa de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme oppose à l'action une prescription quinquennale qui court à compter « du dernier versement des taxes ou contributions ou de l'obtention des prestations indûment exigées ». Enfin, l'action en répétition est d'ordre public. Une société bénéficiant d'une autorisation de construire un centre hippique ne peut ainsi renoncer par convention à son droit à répétition d'une participation financière relative au financement d'un carrefour affecté à la circulation générale (TA Amiens 22 avr. 2003, SARL Tison, n° 00417).

 

Sous réserve de la répétition de l'indu, qui est commune à toutes les créances d'urbanisme, la procédure de contestation de ces créances est traditionnellement liée à leur nature fiscale ou non fiscale. La jurisprudence laisse toutefois émerger une catégorie résiduelle de créances quasi fiscales qui emprunte aux deux régimes de contestation.

 

 

La procédure de contestation des créances fiscales

 

Les créances d'urbanisme à caractère fiscal, telles que la taxe locale d'équipement et assimilées (taxes départementales en faveur des espaces naturels sensibles, des conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement et du département de la Savoie), le versement pour dépassement du plafond légal de densité, la redevance pour la création de bureaux en Ile-de-France (sur la nature fiscale de cette redevance, v. CE 17 déc. 2003, Ministre de l'Equipement, des Transports, du Logement, du Tourisme et de la Mer c/ Rado, Lebon T. 771 et 899  ; RJF 03.2004.255 ; concl. L. Vallée, BDCF 03.2004.38), ou la redevance d'archéologie préventive, obéissent au régime du contentieux fiscal. Ces impositions présentent, en apparence, un aspect hétéroclite, accentué par la diversité de leur dénomination (taxe, versement, redevance). Toutefois, elles sont toutes considérées, dans l'acception large de cette notion, comme des impositions dont la délivrance du permis de construire constitue le fait générateur. « La notion d'imposition dont la délivrance du permis de construire constitue le fait générateur doit être entendue au sens large, dès lors que la délivrance du permis de construire n'est le fait générateur unique d'aucune taxe d'urbanisme. Toutes sont dues dans les cas où la construction est soumise seulement à une déclaration de travaux, ou lorsque la construction a été irrégulièrement réalisée sans permis » (G. Goulard, BDCF 06.2002.78).

 

Le contentieux fiscal appliqué à ces impositions présente trois caractéristiques spécifiques : le principe de la réclamation préalable, la distinction du contentieux de l'assiette et du contentieux du recouvrement et la procédure de restitution des créances fiscales.

 

 

La réclamation préalable

 

Les contribuables ont, tout d'abord, l'obligation de porter leur contestation devant l'administration avant de saisir le juge. Il ressort en effet des arrêts Etablissements Outters du 20 décembre 1985 (CE Ass. 20 déc. 1985, SA Etablissements Outters, Lebon 382  ; RJF 02.1986.194-195, chron. P. Crouzet, p. 71), que « pour toute imposition au sens de l'article 34 de la Constitution, le juge administratif ne peut être saisi qu'après une réclamation préalable à l'administration comme le prévoient les textes pour les impôts mentionnés au CGI » (GAJF, Dalloz, 2003, 4e éd., p. 19).

 

Cette solution, codifiée à l'article R. 772-2 du code de justice administrative, signifie par conséquent que la redevance pour construction de bureaux en Ile-de-France est soumise à cette obligation, bien qu'aucun texte ne le prévoie expressément (CE 17 déc. 2003, Ministre de l'Equipement, des Transports, du Logement, du Tourisme et de la Mer c/ Rado, préc.). Cette étape de la procédure contentieuse fiscale est essentielle, car le contentieux reste définitivement fixé par le quantum contesté devant l'administration, le juge de l'impôt ne pouvant accorder une décharge ou diminution pour un montant supérieur à celui indiqué dans la réclamation (TA Nice 16 juin 2005, SCI Gardens of Eden, n° 0001652).

 

 

Le contentieux de l'assiette et le contentieux du recouvrement

 

Le régime contentieux des taxes d'urbanisme, sous réserve des spécificités de la redevance pour création de bureaux en Ile-de-France développées infra, diffère selon qu'il est relatif au contentieux d'assiette et de liquidation, ou au contentieux du recouvrement.

 

Les réclamations étrangères au recouvrement sont adressées au service liquidateur, c'est-à-dire à la direction départementale de l'équipement, ou à la commune bénéficiaire d'une délégation préfectorale au sens de l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme (art. R. 332-26 C. urb.) (v. pour la TLE, CE 17 juin 1987, SCI Les Casals, req. n° 71652, RJF 08-09.1987.993 ; pour la participation PLD : CE 14 nov. 1990, Chabert - SARL Entreprise Générale Chabert, req. n° 88484, RJF 01.1991.70 ; pour la redevance pour création de bureaux, CE 8 mars 2002, Société Cofifap, Lebon T. 688  ; AJDI 2003. 54, note J.-P. Maublanc  ; RJF 06.2002.650 ; concl. G. Goulard, BDCF 06.2002.78) (1). L'article 255 A du livre des procédures fiscales prévoit, en effet, que les taxes d'urbanisme sont assises, liquidées et recouvrées en vertu d'un titre de recette individuel ou collectif délivré par le directeur départemental de l'équipement ou le maire compétent pour délivrer les permis de construire au nom de la commune en application de l'article L. 421-2-1 du code de l'urbanisme. La délégation préfectorale par laquelle la commune liquide les taxes d'urbanisme en tant qu'autorité déconcentrée est délivrée à la demande de la commune ou avec son accord. Selon le rapport sur la gestion de la taxe locale d'équipement d'avril 2006, 400 communes, telles que Marseille ou Paris, assurent la liquidation des taxes d'urbanisme (B. Brassens, S. Escande-Vilbois, M. Linet et F. Lenoël, Rapport sur la gestion de la taxe locale d'équipement et des taxes rattachées, mission d'audit de modernisation avr. 2006, www.ladocumentationfrancaise.fr). Il résulte ainsi de ces dispositions que le maire qui s'est vu confier par le préfet l'établissement de l'assiette et la liquidation du versement pour dépassement du plafond légal de densité par un arrêté de délégation postérieur au permis de construire, dont la date constitue le fait générateur, n'était pas compétent pour déterminer l'assiette et liquider le versement mis à la charge de la requérante (TA Montpellier 6 avr. 2006, Mme Humbert-Fayol, n° 0104543).

 

Ces réclamations sont recevables, en principe, jusqu'au 31 décembre de la deuxième année suivant celle du versement ou de la mise en recouvrement de la taxe (art. R. 196-1, a, b, LPF ; pour les impôts sui generis - TLE et assimilées - art. 406 nonies, Ann. III, CGI) (v. CAA Paris 26 janv. 2006, SA Compagnie privée de réalisations immobilières et SARL Realim, req. n° 01PA04283). Ces délais deviennent toutefois inopérants lorsque le contribuable fait l'objet d'une procédure de reprise ou de redressement de la part de l'administration des impôts. Dans cette hypothèse, il dispose d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations (art. R. 196-3 LPF).

 

A l'exception des litiges relatifs à la détermination de la valeur du terrain qui sont soumis à la juridiction de l'expropriation (versement pour dépassement de PLD - les parties à l'instance ne peuvent être que le pétitionnaire et le directeur des services fiscaux ; l'administration instruisant la demande de permis de construire ne peut intervenir : Civ. 3e, 4 avr. 2001, Commune de Saint-Ouen c/ Société Z Invest, AJDI 2001. 813, note A. Lévy ), l'intéressé doit saisir le juge administratif dans un délai de deux mois à compter de la notification d'une décision expresse de rejet de sa réclamation préalable. Les services liquidateurs statuent sur les réclamations dans le délai de six mois suivant la date de leur présentation (art. R. 198-10 LPF). Le juge administratif statuant en plein contentieux, aucune forclusion ne peut être opposée au contribuable qui présente au juge de l'impôt, à l'expiration de ce délai, une demande en contestation de la décision implicite de rejet. Si, toutefois, une décision expresse intervient après l'expiration du délai de six mois, le délai de deux mois commence à courir à partir de la notification de cette décision (CE 9 mars 1983, Société Sogeparc-Paris, Lebon 98  ; RJF 05.1983.661).

 

Les réclamations relatives au recouvrement des créances fiscales sont adressées au trésorier-payeur général. L'opposition aux poursuites doit, à peine de nullité, être formée dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'acte si la contestation porte sur la régularité formelle de l'acte ou sur les modalités d'exercice des poursuites, ou à compter du premier acte qui permet d'invoquer le motif de la contestation dans les autres cas (art. R. 281-2 LPF). Le chef de service se prononce dans un délai de deux mois à partir du dépôt de la demande dont il doit accuser réception. Si aucune décision n'a été prise dans ce délai ou si la décision rendue ne lui donne pas satisfaction, le redevable doit, à peine de forclusion, porter l'affaire devant le juge administratif (quotité ou exigibilité de l'obligation) ou le juge de l'exécution (président du TGI : régularité formelle de l'acte) dans le délai de deux mois à compter soit de la notification de la décision expresse, soit de l'expiration du délai de deux mois ayant fait naître la décision implicite (art. R. 281-4 LPF).

 

La redevance pour création de bureaux en Ile-de-France, enfin, fait l'objet d'un régime contentieux en pleine mutation. Durant de nombreuses années, il était admis tant par la doctrine que par la jurisprudence que le redevable devait, en matière d'assiette, saisir le juge administratif dans les deux mois qui suivaient la notification de la décision de redevance (v. CE 1er déc. 1982, SCI du 110 avenue Aristide Briand, req. n° 23541). La nécessité de former une réclamation préalable en matière d'assiette vient toutefois bouleverser cet état du droit (CE 17 déc. 2003, Ministre de l'Equipement, des Transports, du Logement, du Tourisme et de la Mer c/ Rado, préc.). Convient-il de conserver le délai de deux mois, malgré la soumission du redevable à la présentation d'une réclamation ? Dans la négative, quel délai retenir pour la présentation de cette réclamation ? Un jugement du tribunal administratif de Paris du 16 décembre 2004 est particulièrement éclairant sur ce point (TA Paris 16 déc. 2004, Société Foncière Capucines Caumartin et autre, n° 0204785). Tirant toutes les conséquences de l'arrêt Rado de 2003, le juge de l'impôt énonce : « Considérant qu'en prévoyant, à l'article 813 de la circulaire n° 86-12 du 31 janvier 1986 [...] que le redevable de ladite redevance devait adresser sa réclamation préalable «à peine de forclusion» «dans les deux mois qui suivent la notification ou la décision de redevance», le ministre de l'Urbanisme, du Logement et des Transports a édicté des dispositions excédant le champ de sa compétence [...] qu'il résulte de l'instruction que ladite réclamation a été formée dans les délais de droit commun prévus par les dispositions précitées de l'article R. 772-2 du code de justice administrative ». La solution développée par le tribunal de Paris est limpide. Dès lors que l'obligation de former une réclamation préalable posée au premier alinéa de l'article 772-2 du code de justice administrative trouve à s'appliquer à la redevance pour création de bureaux, il convient de soumettre la procédure de contestation au 2e alinéa du même article en termes de délai de présentation de la réclamation (soit une présentation au plus tard le 31 décembre de l'année qui suit celle de la réception par le contribuable du titre d'imposition). On pourrait également s'interroger sur la conservation, ou non, du délai de droit commun de deux mois de naissance d'une décision implicite de rejet, jusqu'alors applicable à la redevance. Mais cette interprétation irait, sans aucun doute, à l'encontre de la jurisprudence initiée par l'arrêt Rado. L'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales, aux termes duquel les services liquidateurs statuent sur les réclamations dans le délai de six mois suivant la date de leur présentation, sera donc retenu en matière de redevance pour création de bureaux en Ile-de-France.

 

En matière de recouvrement, l'article L. 80 du code du domaine de l'Etat prévoit que les réclamations sont recevables jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle de la notification du titre de perception émis par les services fiscaux ou du versement de la somme contestée (v. CE 24 nov. 1986, MAIF, req. n° 60851, RJF 1987, n° 1, p. 60). Le délai de naissance d'une décision implicite en cas d'absence de réponse du Trésor public est, quant à lui, de six mois. On ne saurait trop souligner le caractère anachronique des délais posés par l'article L. 80, en comparaison du régime de contestation étudié pour les autres taxes d'urbanisme. La publication des dispositions réglementaires du code général de la propriété des personnes publiques constituerait, à ce titre, une occasion favorable de mettre fin à l'assimilation de la redevance aux produits du domaine (art. A. 520-10, al. 2, C. urb.), et de l'intégrer expressément dans le dispositif prévu aux articles R. 281-2 et R. 281-4 précités du livre des procédures fiscales.

 

 

La restitution des créances fiscales

 

Le redevable d'une taxe d'urbanisme dont le projet de construction a été abandonné peut obtenir la décharge ou la réduction de cette taxe lorsqu'il ne s'est pas encore acquitté de sa dette, ou sa restitution totale ou partielle lorsqu'il a déjà versé le montant en question (N. Gonzalez-Gharbi, Abandon du projet de construction et exigibilité des taxes et participations d'urbanisme, JCP A 2 déc. 2002, n° 8). La péremption du permis de construire (art. R. 424-17 C. urb.), mais aussi la démolition des constructions en vertu d'une décision de justice, ou encore la modification apportée au permis de construire ou son annulation (l'annulation ne peut ouvrir droit à restitution ou dégrèvement que si elle intervient avant toute construction : Circ. équipement n° 96-40, 19 juin 1996 : Bomelt 1996, n° 19 ; Rép. min. n° 56659, Quentin, JO AN Q 26 nov. 2001, p. 6215), sont autant de motifs de décharge, réduction ou restitution des taxes en cause (TLE et assimilées, art. 1723 quinquies CGI ; PLD, art. 1723 duodecies CGI ; redevance pour création de bureaux, art. L. 520-5 C. urb. ; redevance d'archéologie préventive, art. L. 524-12 al. 2 C. patr.) (pour des illustrations : TA Marseille 16 nov. 2006, Mme Pillard, n° 0307368 ; TA Melun 4 déc. 2003, SCI du 92-94 avenue de la république Maisons-Alfort, n° 013165/4 ; TA Marseille 11 mai 2006, M. Camoin, n° 0304254).

 

La demande en décharge ou restitution se distingue nettement de l'action en répétition, laquelle ne trouve à s'appliquer que dans l'hypothèse où l'accipiens viole les dispositions de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme (J.-P. Demouveaux, note sous CAA Paris 20 déc. 2002, Société Sinka, req. n° 98PA02741, JCP A 5 mai 2003, n° 19). La demande en question doit être précédée d'une réclamation préalable auprès des services liquidateurs. Ces réclamations sont recevables jusqu'au 31 décembre de la deuxième année suivant celle de la réalisation de l'événement qui motive la réclamation (art. R. 196-1 c) LPF ; art. 406 nonies Ann. II al. 2 CGI, pour la TLE et assimilées). La cour administrative d'appel de Lyon, a eu l'occasion de souligner l'illégalité des dispositions de l'article R. 332-9 du code de l'urbanisme relatif au versement pour dépassement de PLD (CAA Lyon 28 juin 2001, Commune de Moulins, req. n° 97LY02703, DF 2002. 352). Il résulte de cet article qu'en cas de permis modificatif, « les demandes de dégrèvement sont recevables jusqu'au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de leur mise en recouvrement, et celles de restitution jusqu'au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle du versement ».

 

Or, ces dispositions sont « entachées d'incompétence en tant qu'elles fixent un délai de réclamation dont le point de départ est, au plus tard, la date de l'avis de mise en recouvrement ou du versement consécutif au permis initial sans tenir compte également de la date, qui peut-être postérieure à la précédente, du permis modificatif ouvrant droit, selon les termes mêmes de la loi, à une diminution de l'impôt » (arrêt supra). Les dispositions applicables au titre du versement pour dépassement de PLD sont donc celles de l'article R. 196-1 c) du LPF (v. CAA Paris 26 janv. 2006, req. n° 01PA04283, préc.).

 

En matière de redevance pour création de bureaux en Ile-de-France, le contribuable peut en demander la réduction, lorsque le projet n'a été réalisé que partiellement (art. L. 520-5 al. 2 C. urb.). Il peut également en demander la restitution lorsque le projet a été abandonné et qu'il renonce au bénéfice du permis (art. L. 520-5 al. 3 C. urb.), ou lorsque des locaux construits à titre précaire ont été démolis dans les six mois qui suivent l'expiration du permis (art. L. 520-6 et R. 520-8 C. urb.). Le délai de droit commun de deux mois n'étant plus applicable (v. TA Paris 16 déc. 2004, préc.), une interprétation a pari du deuxième alinéa de l'article R. 772-4 du code de justice administrative devrait conduire à présenter une réclamation préalable avant le 31 décembre de l'année qui suit celle de la réalisation de l'événement qui motive la réclamation.

 

 

La procédure de contestation des créances non fiscales

 

Les participations d'urbanisme sont soumises, en matière contentieuse, au droit commun des créances publiques non fiscales. Ces participations peuvent se voir contestées de trois façons différentes : le recours pour excès de pouvoir contre les dispositions financières du permis de construire, la contestation de l'état exécutoire, et enfin l'action en restitution des créances non fiscales (v. J.-P. Demouveaux, Participation financière contre permis de construire, préc.).

 

 

Le recours pour excès de pouvoir

 

Une ancienne jurisprudence tendait à appliquer au recours pour excès de pouvoir contre la clause financière du permis de construire ou de lotir les règles procédurales de droit commun, c'est-à-dire l'indivisibilité du permis et l'obligation d'exercer son recours dans le délai traditionnel de deux mois (CE 19 juin 1981, M. Royer, req. n° 14243, Dr. adm. 1981. 236). Le succès du recours du débiteur en annulation du permis était donc pour le moins équivoque : s'il n'était plus redevable de la créance publique, il perdait également le bénéfice des clauses non financières l'autorisant à réaliser son projet immobilier. L'arrêt Plunian a cependant opéré un revirement de jurisprudence sur cette question (CE Sect. 13 nov. 1981, Plunian, Lebon 413  ; AJDA 1982. 92, chron. Tiberghien et Lasserre ; JCP 1982. II. 19849, note F. Bouyssou). Il ressort de cet arrêt que l'action en annulation d'une clause financière d'une autorisation de lotissement est réputée présentée en matière de travaux publics. Cet arrêt, dont la solution a été codifiée à l'article L. 332-7 du code de l'urbanisme consacre, par conséquent, la divisibilité des clauses financières du permis et l'inapplicabilité du délai de droit commun de deux mois. Le délai de recours contentieux de deux mois court, à partir du 1er octobre 2007, à compter de l'affichage du permis sur le terrain (art. R. 600-2 C. urb.). Ce délai est porté à un an à compter de l'achèvement de la construction lorsque la preuve de l'affichage régulier du permis ne peut être rapportée (art. R. 600-3 C. urb.). La loi engagement national pour le logement (ENL) du 13 juillet 2006 a certes posé un principe général de divisibilité des autorisations (art. L. 600-5 C. urb., v. S. Pérignon, La sécurisation des autorisations d'urbanisme et des constructions existantes, AJDA 2006. 1549 ). Mais l'intérêt demeure en matière de délai de saisine des juridictions. Le bénéficiaire du permis doit toutefois agir avant que la déchéance quadriennale ne soit acquise s'il veut être remboursé des sommes payées indûment. Par ailleurs, la procédure de notification à l'auteur de la décision contestée, prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, ne s'applique pas aux clauses financières des permis de construire (CE 24 mars 2006, Ville de Saint-Denis de la Réunion, AJDA 2006. 688 ). Enfin, l'annulation d'une clause financière n'implique pas, à défaut de conclusions en ce sens, la décharge de la participation en litige (CE Sect. 13 nov. 1981, Plunian, préc.).

 

 

La contestation de l'état exécutoire

 

Le débiteur de la créance publique peut également contester l'état exécutoire (L. Saïdj, Les opérations d'exécution du budget communal : les recettes, Rép. collectivités locales, n° 39). Cette procédure, dont l'origine remonte à l'article 63 de la loi du 18 juillet 1837, consiste à recouvrer les produits des communes « qui ne sont pas assis et liquidés par les services fiscaux de l'Etat [...] en vertu d'arrêtés ou de rôles pris ou émis et rendus exécutoires par le maire » (art. R. 2342-4 CGCT). L'opposition à état exécutoire permet de contester l'existence, l'exigibilité ou le montant de la créance. L'action dont dispose le débiteur pour faire opposition à état exécutoire « se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire » (art. L. 1617-5-2° CGCT). La participation d'urbanisme ayant une nature administrative, c'est le juge administratif statuant en pleine juridiction qui est compétent pour recevoir le recours en opposition. L'opposition à poursuites porte, quant à elle, « sur la régularité formelle de l'acte de poursuite diligenté à [l'encontre du débiteur] » (art. L. 1617-5, 2° al. 2 CGCT). Aux termes de l'article L. 1617-5, 2°, al. 2 du CGCT : « L'action dont dispose le débiteur [...] pour contester devant le juge de l'exécution [...] la régularité formelle de l'acte de poursuite [...] se prescrit dans le délai de deux mois suivant la notification de l'acte contesté ».

 

Le juge de l'exécution compétent pour recevoir le recours est le président du tribunal de grande instance ou un juge du tribunal délégué par le président. La procédure de contestation de l'état exécutoire se caractérise par deux éléments communs aux deux types d'opposition : l'absence de recours préalable à la saisine du juge (v. CE 16 oct. 1963, Gallois-Allant, Lebon 949 ; AJDA 1964. 48, note G. Montagnier ; Com. 24 nov. 1981, Trésorier principal de Bordeaux, n° 80-11.951, Bull. com. n° 412), et le caractère suspensif de la contestation (art. L. 1617-5-1° CGCT).

 

 

La restitution des créances non fiscales

 

La procédure de restitution des créances non fiscales dépend, non de l'abandon du projet immobilier, mais de l'inexécution des équipements publics par les collectivités bénéficiaires. Cette procédure de restitution ne peut être engagée qu'en vertu d'une disposition expresse, à défaut de laquelle la restitution ne peut être demandée. Sont ainsi sujettes à restitution les participations exigées dans le cadre d'un plan d'aménagement d'ensemble (PAE, art. L. 332-9 C. urb.), de même que la participation pour voiries et réseaux (art. L. 332-6-1 d) C. urb.). La restitution d'un terrain cédé à titre gratuit au titre du e) de l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme est, en revanche, prohibée.

 

En premier lieu, l'article 332-11 du code de l'urbanisme, relatif aux participations prévues dans le cadre d'un PAE, énonce que : « Si les équipements publics annoncés n'ont pas été réalisés dans le délai fixé par la délibération instituant ou modifiant la participation, la restitution des sommes éventuellement versées ou de celles qui correspondent au coût des prestations fournies peut être demandée par les bénéficiaires des autorisations de construire ». La restitution correspond toutefois à la part excédant le montant de la taxe locale d'équipement qui aurait été exigible en l'absence de délibération prévoyant un PAE (CAA Lyon 13 juill. 2006, Commune de Challes-les-Eaux, req. n° 03LY01929). Lorsque la participation a été payée par le lotisseur, la restitution peut être réclamée par le constructeur qui en aura définitivement supporté la charge. Par ailleurs, le délai de réalisation des équipements publics doit être précisément déterminé (en mois ou en années), les dispositions prévoyant un délai conditionnel ou lié à l'achèvement des travaux étant par conséquent illégales (CAA Paris 21 mars 1996, Commune de Fosses). Le délai pour former une action en restitution ne peut enfin se voir opposer que la déchéance quadriennale.

 

En deuxième lieu, l'article L. 332-11-2 du code de l'urbanisme, relatif à la participation pour voirie et réseaux, prévoit que les « sommes représentatives du coût des travaux non réalisés sont restituées au propriétaire, sans préjudice des indemnités éventuelles fixées par les tribunaux ».

 

En troisième lieu, le Conseil d'Etat refuse toute possibilité de restitution d'un terrain cédé gratuitement en cas de non-réalisation de l'équipement en question (CE 8e et 9e ss-sect. 11 janv. 1995, Epoux Thot, AJDI 1996. 127, obs. C. M.  : en l'espèce, la parcelle cédée en vue de permettre la création d'une voie nouvelle avait été vendue in fine par la commune aux voisins des requérants). On ne peut toutefois que regretter la solution développée dans cet arrêt, qui contrevient aux grands principes constitutionnels, s'oppose à la volonté du législateur et infirme la doctrine administrative. Le droit de rétrocession, tout d'abord, procède directement des dispositions de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme, qui consacre la valeur constitutionnelle du droit de propriété. Par ailleurs, il ressort des débats parlementaires qui ont présidé à l'adoption de l'article 72 de la loi du 30 décembre 1967, que l'intention du législateur était de limiter strictement les modalités d'application de la cession aux nécessités de l'intérêt général (JO déb. Sénat 1967. 1229 ; v. P. Galan, Les cessions gratuites de terrains de l'article R. 332-15 du code de l'urbanisme, RDI 1998. 49 ). Enfin, la doctrine administrative infirmée par l'arrêt considérait que « le terrain devait être rétrocédé gratuitement au cédant d'origine, la collectivité n'ayant pas le droit de la conserver pour réaliser une autre opération » (Rép. min. n° 28404, JO AN Q 2 mai 1983, p. 2060). En l'occurrence, l'absence de fixation d'un délai précis de réalisation de l'équipement public dans le permis de construire, ou son non-respect par le cessionnaire, devraient être de nature à permettre l'exercice d'un tel droit de rétrocession.

 

 

La procédure de contestation des créances quasi fiscales

 

La nature juridique des taxes et participations d'urbanisme peut parfois présenter une utilité toute relative, pour reprendre l'expression de maître Gonzalez-Gharbi, lorsqu'il s'agit de déterminer leur régime contentieux. La participation pour non-réalisation d'aires de stationnement, actuellement codifiée au 4e alinéa de l'article L. 421-3 du code de l'urbanisme (art. L.123-1-2 nouveau, C. urb.), en constitue une parfaite illustration. Si cette participation ne présente pas un caractère fiscal, les réclamations relatives à son bien-fondé sont instruites et jugées selon les règles de la procédure fiscale, alors que son recouvrement obéit aux règles de droit commun des créances publiques non fiscales.

 

 

Des créances présentant un caractère non fiscal

 

Le caractère non fiscal de la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement ressort de l'arrêt Vincent (CE Sect. 26 mars 1999, Vincent, Lebon 109  ; RJF 04.2000.497 ; AJDI 2000. 58, concl. Bonichot  ; DF 30-35/89, c. 616). La Haute juridiction énonce que la participation « doit être regardée, non comme une imposition, mais comme une participation que la loi, dans les limites qu'elle définit, autorise la commune à percevoir sur le bénéficiaire du permis de construire à raison des équipements publics dont la réalisation est rendue nécessaire par la construction ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Paris a pu, sans commettre d'erreur de droit considérer que M. Vincent n'était pas recevable à se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du LPF, des dispositions de la circulaire du 29 décembre 1978 ». Par cette décision, le Conseil d'Etat entend clairement limiter le champ des impositions sui generis, qui ne se rattachent à aucune catégorie d'impôt (TLE et ass.).

 

La nature non fiscale de cette participation autorise ainsi son débiteur à demander en justice l'annulation des clauses financières du permis de construire (art. R. 332-23 C. urb.), de même que la restitution de la participation, lorsque la commune ou l'établissement public compétent n'a pas affecté le montant de la participation à la réalisation d'un parc public de stationnement dans le délai de cinq ans à compter du paiement (art. R. 332-22 d) C. urb. ; CAA Versailles 4 nov. 2004, M. Correia da Costa, req. n° 02VE00705, Coll. terr. déc. 2004, n° 12, comm. 252, G. Pellissier). Cette nature non fiscale ne fait toutefois pas obstacle à l'application de certaines règles de procédure liées aux taxes d'urbanisme, telles que le dégrèvement ou la restitution de la participation en cas d'abandon du projet de construire (art. R. 332-22 a, b, c, C. urb.). Mais c'est l'application de la procédure fiscale au contentieux de l'assiette et de la liquidation qui distingue tout particulièrement cette participation des autres créances non fiscales liées à l'urbanisme.

 

 

La procédure fiscale appliquée au contentieux de l'assiette

 

Aux termes de l'article R. 332-23 du code de l'urbanisme : « Les litiges relatifs à la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement sont de la compétence des juridictions administratives. Sans préjudice du recours pour excès de pouvoir susceptible d'être formé contre la décision d'octroi du permis de construire, les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles de procédure applicables en matière d'impôts directs ». Il ressort de cet article que le contentieux de l'assiette de la participation obéit aux règles de la procédure fiscale. La réclamation préalable auprès du service liquidateur constitue ainsi une obligation, dont l'inexécution est sanctionnée par l'irrecevabilité de la requête (art. R. 190-1 LPF ; v. CAA Nantes 16 mai 2006, Compagnie européenne d'opérations immobilières BIE, req. n° 04NT00157).

 

 

 

En application des a) et b) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, les réclamations relatives à la participation doivent être présentées au service liquidateur au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de son versement ou de sa mise en recouvrement (CE 9 nov. 1990, Ville d'Aurillac c/ Puech et Zuber, req. n° 79077, Dr. fisc. 2000, n° 1040). Lorsque la réclamation est adressée à tort au service du recouvrement, celui-ci a l'obligation de transmettre la réclamation au service liquidateur (art. R. 190-2 LPF). Par conséquent, une demande adressée au tribunal administratif ne peut être rejetée comme irrecevable, lorsque le service du recouvrement n'a pas transmis la réclamation en question (CE 30 juill. 2003, Commune d'Aubagne, req. n° 220914 ; RJF 11.2003.1249 ; concl. G. Goulard, BDCF 11.2003.140).

 

Enfin, la procédure de dégrèvement et de restitution de la participation prévue à l'article R. 332-22 précité du code de l'urbanisme suit également le régime contentieux relatif aux créances fiscales. Les réclamations en restitution ou dégrèvement doivent être présentées au service liquidateur au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de la réalisation de l'événement qui motive la réclamation (art. R. 196-1 c) LPF).

 

 

La procédure de droit commun des créances publiques non fiscales appliquée au recouvrement

 

La procédure de recouvrement de la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement est régie par les dispositions de l'article R. 332-20 du code de l'urbanisme, aux termes desquelles « la participation est recouvrée en vertu d'un titre de recette émis au vu du permis de construire par l'ordonnateur de la commune [...] conformément à l'article R. 241-5 du code des communes, les poursuites pour son recouvrement ont lieu comme en matière d'impôts directs ». Dans les arrêts SARL Le Paris (CE 19 avr. 2000, Lebon T. 1285  ; RJF 05.2000.628 ; concl. J. Courtial, Dr. fisc. 51/00, comm. 1040) et Commune du Grau-du-Roi (CE 19 mars 2001, Commune du Grau-du-Roi c/ Palanque, req. n° 194861, RJF 06.2001.799), le Conseil d'Etat a eu l'occasion de développer une interprétation originale de l'article R. 332-20 précité. Dans l'affaire SARL Le Paris, la société avait saisi le tribunal administratif de Nice de conclusions dirigées contre un acte de poursuite en recouvrement d'une participation pour non-réalisation d'aires de stationnement. Le juge de l'impôt avait toutefois rejeté ses prétentions, au motif que les moyens invoqués portaient sur le bien-fondé de la dette. Ils ne pouvaient donc être utilement invoqués à l'appui d'une contestation d'un acte de poursuite régie par l'article L. 281 du livre des procédures fiscales. Cet article énonce ainsi que les contestations ne peuvent porter notamment que sur des motifs « ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt » (TA Nice 6 juill. 1995, Société Le Paris). La requérante ayant soulevé devant la cour administrative d'appel de Lyon un moyen relatif à l'exigibilité, cette dernière l'avait rejeté au motif « qu'un tel moyen, relatif à l'exigibilité de la dette, repose sur une cause juridique distincte de celle à laquelle se référait le recours de première instance et constitue, par suite, une demande nouvelle irrecevable » (CAA Lyon 21 nov. 1996, Société Le Paris, req. n° 95LY01829). La question posée au juge de cassation était la suivante : les règles du contentieux du recouvrement de l'impôt sont-elles applicables au contentieux du recouvrement de la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement ? Les juges du fond avaient répondu par l'affirmative. Mais cette interprétation de l'expression selon laquelle « les poursuites pour son recouvrement sont exercées comme en matière d'impôts directs » était loin de correspondre à la jurisprudence du Conseil d'Etat. La Haute cour a ainsi jugé que cette expression, codifiée de manière plus générale à l'article R. 241-4 du code des communes (art. R. 2342-4 CGCT), ne pouvait conduire à appliquer les dispositions fiscales relatives au recouvrement (CE 30 mai 1980, Fréry). S'inspirant de cette interprétation, le juge de cassation répond par la négative à la question posée. Il considère ainsi que le recouvrement des produits communaux « comme en matière d'impôts directs » a pour seul objet d'étendre au recouvrement de ces produits les modalités d'exercice des voies d'exécution prévues pour les impôts directs. Par conséquent, le droit commun du recouvrement, pour lequel les contentieux de l'assiette et du recouvrement forment un seul litige trouve à s'appliquer à l'espèce (sous réserve que « l'on ne peut contester à l'occasion d'un acte de procédure ultérieur la légalité d'un état exécutoire devenu définitif » : CE 1er févr. 1978, Delauney, req. n° 03963, RD publ. 1979. 297). Le juge de cassation estime que le redevable peut « contester, à l'occasion d'un recours contre une mesure de recouvrement, la régularité ou le bien-fondé de la participation qui lui a été assignée, dès lors qu'il a introduit [...] une réclamation [d'assiette] et que cette réclamation a fait l'objet d'une décision expresse ou tacite de rejet non définitive ». L'arrêt Commune du Grau-du-Roi reprend à son compte la solution développée par l'arrêt SARL Le Paris (v. également : CAA Versailles 16 nov. 2006, Mlle Mencaraglia, req. n° 04VE03541). L'arrêt Ozilou précise enfin que l'obligation de réclamation préalable ne s'impose pas au contribuable qui conteste la légalité d'un acte de poursuite (CE 20 oct. 2004, Ozilou, req. n° 252808, RJF 01.2005.30).

 

 

 

***

Dans la mythologie grecque, Ariane, soeur de Phèdre, et fille du roi de Crète Minos, sauva Thésée du Minotaure par un subterfuge. Elle lui donna, selon la légende, une pelote de fil qu'elle avait reçue de Dédale, l'inventeur et architecte du Labyrinthe. En attachant une extrémité du fil à la porte et en le dévidant à mesure qu'il avançait, Thésée put, après avoir tué le Minotaure, retrouver son chemin dans l'enchevêtrement des couloirs. La mythologie rejoint parfois la réalité, comme nous le montrent aisément les procédures de contestation des taxes et participations d'urbanisme. Tel Thésée aidé par le fil d'Ariane, le débiteur d'une créance d'urbanisme doit suivre scrupuleusement les différentes obligations contentieuses auxquelles il est soumis, s'il veut espérer pourfendre le Minotaure juridique, symbolisé par cette étrange participation quasi fiscale pour non-réalisation d'aires de stationnement.

 

On ne saurait toutefois conclure hâtivement à la modification de cette jurisprudence, tant le régime hybride ainsi développé bénéficie directement au redevable de la participation, notamment en écartant l'application de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales. Plus grave, en revanche, est l'absence de reconnaissance d'un droit général à restitution en matière de créances non fiscales. L'arrêt M. et Mme Thot interpelle par son caractère injuste et devrait conduire, espérons-le, à un assouplissement de la jurisprudence du Conseil d'Etat. Un tel élargissement s'inscrirait d'ailleurs pleinement dans la volonté du législateur de faciliter l'acquisition de terrains et permettre l'implantation d'immeubles à usage de logement, exprimée dans la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (P. Billet, La loi ENL, JCP A 2007. 2020).

 

 

Mots clés :

URBANISME * Fiscalité de l'urbanisme * Taxe d'urbanisme * Participation * Créance d'urbanisme * Action en répétition de l'indu

CONTRIBUTION ET TAXE * Fiscalité locale * Taxe locale d'équipement * Redevance

 

 

En matière de redevance d'archéologie préventive, v. toutefois l'art. L. 524-8 C. patr.